L’incompréhension la plus profonde relative à l’économie, la monnaie et la croissance, repose sur la confusion relative à la durée de vie finie des hommes tandis que leur réflexion suppose qu’il y aurait des “débiteurs” et des “créditeurs” immortels. Elle repose aussi sur la confusion relative à l’assimilation de la “croissance économique” avec la “croissance des flux matériels”, ignorant toute la partie immatérielle de la croissance et ne comprenant pas la différence qu’il y a entre mesure des nombres monétaires et mesure des flux sous-jacents à ces nombres.
Cette double confusion revient à penser l’économie dans une boîte euclidienne, alors qu’elle se place plus correctement dans un espace en expansion où non seulement les objets, mais aussi les acteurs même de l’économie sont périssables et renouvelables, non-éternels.
Dit autrement, quel genre de dette aurait donc un nouveau né relativement aux morts ? Thomas Paine avait parfaitement compris ce point essentiel.
Nous avons déjà plusieurs fois traité ce sujet dans les posts relatifs au flux temporel et nous allons de nouveau éclairer ce sujet en approfondissant notre réflexion sur l’objet d’une masse monétaire en expansion, mais reposant sur des unités finies.
Soit une masse monétaire d’un SEL (Système d’Echange Local) reposant sur une base de donnée, où chaque unité monétaire est enregistrée, alimentée par un Revenu de Base Inconditionnel de 8% par an, initialisée à t=0 à 100 unités par mois et par personne et reposant sur une communauté humaine de 100 millions (10⁶) de personnes.
Au bout d’une année, la masse monétaire sera de 100 x 10⁶ x 100 x 12 = 12 x 10¹⁰ unités
Cette masse étant croissante, le Revenu de Base relativiste de 8% par an, augmentera. Et au bout de 80 ans, espérance de vie humaine, la communauté humaine initiale est passée de vie à trépas, et remplacée par une communauté de 100 millions de nouveaux membres. Quel genre d’intérêt y-a-t-il alors pour un nouveau né de savoir que son Revenu de Base sera de 10, ou bien de 100 ou encore de 100 000, étant donné qu’il est parfaitement relatif à la masse monétaire totale ainsi générée ?
Il ne s’agit véritablement que d’un pur changement de référentiel parfaitement neutre.
Poursuivons. La masse monétaire au bout de 30 ans est multipliée par (1 + 8%)³⁰ = 10, ainsi donc que le revenu de base.
Mais donc à ce moment là, ou bien encore au bout de 60 ans lorsqu’elle aura été multipliée par 100, on peut très bien décider de changer d’unité de compte par 10 devenant 1 (ou par 100 devenant 1), les anciennes unités étant donc regroupées pour faire 1 nouvelle unité avec 10 anciennes, tous les prix et salaires s’exprimant alors au choix en ancienne unités ou en nouvelles, il ne s’agit que d’un nom et cela ne change donc en rien la valeur relative de la monnaie, ni la valeur relative du Revenu de Base, puisqu’il est par construction non pas une valeur absolue, mais une valeur relative à la masse monétaire.
Mais cela va améliorer le stockage. Puisque d’une masse d’unités stockée de désormais 12×10¹¹, on passe alors à une masse d’unités stockées de 12×10¹⁰, revenant ainsi en terme de stockage au temps initial, mais en terme monétaire avec une monnaie étant 10 fois plus élevée en comparaison.
Nous avons donc une croissance infinie de la monnaie, au sein d’une base de donnée finie.
En terme de taille si on admet que chaque unité serait stockée sur 200 octets, on obtiendrait donc :
24 x 10¹² octets <= taille de stockage <= 24 x 10¹³ octets
Soit entre 24 et 240 disques durs de 1 teraoctet, rien qui ne représente quoi que ce soit de signifiant. Si on pense que cette base de donnée est partagée entre 100 millions d’individus en P2P, cela représentera très peu par personne même en tenant en compte des duplications nécessaires.
Voilà qui est le fondement même de la non-limite technique d’un projet de protocole et logiciel monétaire tel que OpenUDC.
Mais donc de la même façon, les générations étant infiniment distantes de 80 ans en 80 ans, d’espérance de vie en espérance de vie, on comprend avec un raisonnement similaire que la mesure de la croissance d’un “PIB” c’est à dire de la croissance des seules unités monétaires d’échanges, mesurant d’une année sur l’autre “ce qui est échangé monétairement”, peut très bien “croître” de façon apparente, numérairement, tout en n’étant en réalité basé que sur un flux matériel fini, voire même un flux matériel en décroissance.
Il y a donc une grossière erreur de compréhension à confondre mesure de l’activité économique sur la base de l’outil monétaire et mesure des flux économiques matériels et/ou énergétiques qui peuvent en être parfaitement décorrélés.
Autrement dit, la monnaie n’est pas ce qui est échangé entre les hommes et la mesure d’un objet n’est pas l’objet.